lundi 27 février 2012

LITTERATURE / Les couleurs de l'hirondelle. MARIUS DANIEL POPESCU. (José Corti)



                                          
Dans le numéro spécial " Par dessus le mur l'écriture" de 2006, nous écrivions à propos de Marius Popescu que nous avions eu la chance de rencontrer : "Pour Marius Popescu, la poésie est une façon de vivre. Qu'il parle ou qu'il écrive, les mots se mettent à chanter et ne sont jamais anodins. Son sens de l'absurde et de la dérision mêlé à une grande tendresse  font  de lui un écrivain profondément attachant". A cette époque, il avait publié deux recueils de poésie: 4x4. Poèmes tout terrains (1995) et Arrêts déplacés(2004) aux éditions Antipode. La sortie de son premier roman La symphonie du loup (Corti 2007) nous avait confortés dans ce que nous pensions. Avec Les couleurs de l'hirondelle, Popescu confirme son immense talent. Personne n'écrit comme lui. Quand Olivier Kahn avait demandé à son éditeur pourquoi il avait pris le risque de publier un auteur aussi atypique, celui-ci avait répondu : "Parce que Popescu a une plume étonnante, trempée dans le quotidien sans faux populisme ni snobisme. D'ailleurs il serait impensable qu'il n'écrive pas : sa boîte crânienne ne résisterait pas à l'accumulation des histoires qu'il a observées ou imaginées". Les éditions Corti ne s'y sont pas trompées. Popescu est un écrivain vrai et libre, incapable de tricher. Dans ce livre, il nous fait assister à la mise en bière de sa mère en Roumanie, à l'accouchement de sa femme en Suisse, à ses jeux d'enfant sous la dictature, à ceux de sa fille à Lausanne, au suicide d'un vieux qui fuit la maison de retraite etc. Ses mots sont si précis, son style si vivant, que nous ne sommes plus simplement des lecteurs : nous assistons véritablement à ces événements, que ce soit des tragédies ou des petites choses du quotidien. Son enfance fait écho à celle de sa fille, à la nôtre. Il mélange les pronoms comme pour montrer qu'il peut s'agir de lui, de nous, d'un autre. Les dialogues sont fondus dans le texte, les chapitres n'obéissent à aucune règle logique, les associations d'idées peuvent nous emmener de la chambre d'un petit garçon mort à celle de sa fille qui lui demande de jouer "à l'école". Les descriptions méticuleuses nous font vivre parfois la décomposition complète des gestes du narrateur qui prépare une salade...
Mais La symphonie du loup et Les couleurs de l'hirondelle ont une telle densité qu'il est inutile d'ajouter des mots à ceux de Marius Daniel Popescu. Ces deux romans (récits?) sont aussi jubilatoires que sombres, on y vit des moments d'une telle intensité, moments de deuil, d'amour, d'amitié, qu'on ne sait bientôt plus ce qui appartient à notre vie et ce qui appartient à celle que nous livrent ces deux oeuvres hors du commun.
Marius Popescu ne fait pas du nouveau roman ni du Perec comme le disent parfois certains critiques, Marius Popescu fait du Marius Popescu, un style qui fera date dans l'histoire de la littérature.

D'autres vidéos d'extraits de lectures de Les couleurs de l'hirondelle filmées par Radu ZERO sont disponibles sur You tube.

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